PRIMAIRES. Les 20 et 27 novembre à venir se tiendront le premier et le second tour de la primaire de la droite et du centre dans l’optique de l’élection présidentielle de 2017. Afin d’éclaircir cet enjeu majeur, nous sommes allés à la rencontre de la députée Les Républicains Isabelle Le Callennec, soutenant la campagne du candidat François Fillon.
Meeting après meeting, débat après débat, la cadence de campagne des candidats de la primaire s’intensifie ces derniers jours : et pour cause, les sympathisants de droite et du centre seront appelés à voter ce dimanche pour la personnalité qu’ils désigneront comme candidat à l’élection présidentielle. C’est une campagne inédite à droite, le Parti Socialiste est le seul grand parti français à avoir organisé une élection de ce genre en 2012, c’est ainsi que François Hollande fut désigné candidat face à Martine Aubry. Mais cette expérience électorale est loin d’être simple, l’incertitude règne toujours en ce qui concerne les favoris, bien qu’Alain Juppé et Nicolas Sarkozy semblent être en mesure de se qualifier pour le second tour d’après la tendance générale des sondages.
Cette primaire ouverte de la droite et du centre est une échéance majeure, car compte tenu du paysage politique français, elle déterminera possiblement le prochain adversaire à Marine Le Pen qui se qualifie en tête du premier tour de la Présidentielle dans toutes les configurations possibles et imaginables d’après les sondages.
Isabelle Le Callennec nous ouvre ainsi la voie concernant la portée réelle d’une telle primaire à droite.
Les primaires ne sont pas dans la tradition de ma famille politique, et si nous l’organisons c’est parce qu’il y a un risque de ce qu’on appelle un 21 avril à l’envers, c’est-à-dire qu’en 2002 on a eu un duel entre Jacques Chirac et Jean-Marie Le Pen qui avait par son score éliminé le candidat socialiste Lionel Jospin. Aujourd’hui, avec le score annoncé du Front National, il y a un véritable risque que les autres partis politiques soient éliminés dès le premier tour.
Mais cette confrontation entre les ténors du parti Les Républicains peut-elle enliser la crise politique en France par une éventuelle guerre des chefs qui fut, par ailleurs, l’un des éléments ayant causé la mort de l’UMP ? D’après la députée Le Callennec, la primaire se déroule parfaitement et serait même un succès dans son organisation.
Les Français sont très intéressés, quand on voit le succès des émissions qui parlent des élections primaires, les deux débats qui ont eu lieu avec des millions de téléspectateurs, les émissions politiques elles-mêmes avec les candidats un par un qui attirent le public, je crois qu’au contraire il y a une soif de changement, une soif de message très clair sur ce qu’il faut faire dans notre pays. C’est une compétition entre des hommes et une femme qui souhaitent accéder au premier poste qui est celui de Président de la République. Donc en effet chacun essaie de se différencier, il y a un peu de publicité comparative, ils sont tous issus du parti Les Républicains donc ils ont tous quand même un ADN commun ; après c’est vrai que dans leurs propositions sur l’emploi, la santé, l’aménagement du territoire, les finances, ils ont des différences entre eux.
Concernant les différences entre les candidats, Isabelle Le Callennec soutient François Fillon dans cette course et estime qu’il a ses chances malgré l’importance de Nicolas Sarkozy et d’Alain Juppé dans les enquêtes d’opinion. Toutefois, un sondage Opinionway publié le mardi 15 novembre a donné l’ancien Premier Ministre Fillon qualifié au second tour avec 25% des voies et remportant la primaire de la droite et du centre face à Alain Juppé, ce qui laisse toujours de l’espoir aux « fillonistes »
François Fillon est un candidat qui est parti depuis trois ans, qui a publié son livre Faire qui est sa proposition pour le projet France. Aujourd’hui il monte en effet dans les sondages : les gens le découvrent, ils voient que c’est quelqu’un qui est honnête, qui est droit, qui a réfléchi à son projet, qui sait où il va et qui ne s’embarrasse pas des petites combines politiciennes. Il est très clair sur ses idées et sur son projet, c’est probablement ce qui commence à faire la différence.
Je pense que François Fillon est aujourd’hui en train de convaincre beaucoup d’indécis, qui attendaient ces débats, ou qui attendaient de rencontrer ces candidats lors de meetings. Et pour une fois, ce qui est souhaité c’est qu’on arrête de voter contre un candidat mais pour un candidat et pour un projet.
Cependant, bien que les candidats de cette primaire veuillent se différencier les uns des autres, des mesures économiques et sociales profondes sont partagées par beaucoup d’entre eux. C’est particulièrement le cas de l’âge de départ à la retraite que la quasi-totalité des candidats souhaite repousser à 65 ans.
Il y a un vieillissement de la population dans notre pays. Tous les pays européens autour de nous ont repoussé l’âge de la retraite, il faut travailler plus longtemps, ne serait-ce que pour équilibrer les régimes de retraite et les caisses de retraite. Si on ne fait pas cet effort qui a déjà été effectué en 2003 et en 2010 [Par François Fillon, Premier Ministre, Ndlr], on ne pourra plus payer les retraites. Mais effectivement c’est quelque chose d’important, même la gauche n’est pas revenue en étant aux affaires sur l’âge de la retraite qui avait été repoussé. Ce que François Fillon propose, mais d’autres aussi, c’est de faire converger les régimes : il y a aujourd’hui une inégalité entre le secteur privé et le secteur public. Mais ils souhaitent aussi, et ce sera difficile à mettre en œuvre car il y aura de la résistance et des corporatismes, revenir sur les régimes spéciaux.
Un autre sujet est fondamental, à savoir le monde de l’entreprise qui nécessite d’après tous les candidats une certaine libéralisation face aux enjeux actuels :
Il faut baisser les charges au maximum, maintenir des dispositifs qui boostent ces entreprises et il faut qu’elles jouent à jeu égal avec leurs homologues européens, américains… Il faut des règles du jeu qui ne les pénalisent pas et l’État et les collectivités locales doivent faire des efforts d’efficacité pour optimiser leur action.
Mais pour pouvoir espérer appliquer ces mesures, il faudra après cette primaire remporter l’ultime élection présidentielle de mai 2017 ce qui n’est pas nécessairement joué d’avance si l’on prend en compte tous les éléments versatiles du paysage politique. Différents paramètres entrent en jeu dont l’annonce de la candidature d’Emmanuel Macron ce mercredi, et puis le candidat que la primaire de la gauche choisira. Mais l’importance du Front National en terme de résultats électoraux est bien plus préoccupante.
Marine Le Pen est une menace sérieuse parce qu’aujourd’hui et depuis plusieurs années les scores du Front National sont élevés voire très élevés. Je vous rappelle qu’aux dernières régionales ils ont fait de tels scores que la gauche a été obligée de se désister parce qu’il y avait un risque d’accession au pouvoir du FN et donc la gauche n’existe plus en région Nord-Pas-de-Calais-Picardie ni en région PACA. Donc oui il y a un risque et c’est la raison pour laquelle on ne peut pas s‘offrir le luxe d’avoir deux candidats à l’élection présidentielle, on peut être éliminés.
De toute manière, si le populisme ne l’emporte pas en France, le prochain Président de la République devra coopérer avec lui, car la victoire de Donald Trump la semaine dernière aux Etats-Unis est un paramètre de taille. Si l’on se fie aux positions du Président élu américain, on constate qu’il va régulièrement à l’encontre des grandes orientations européennes : crise des migrants, Brexit, isolationnisme, protectionnisme, rapprochement russe…
Je dirais ‘wait and see’, je demande à voir puisque pendant la campagne aux Etats-Unis il y a eu des engagements et des promesses qui font réagir pour ce qui est du Président Trump. Encore une fois je demande à voir si la parole de l’Amérique telle qu’elle avait été tenue sous Obama va perdurer ou s’il va remettre en cause beaucoup de chantiers qui avaient été engagés. Il n’est pas tout seul non plus, il va avoir une administration, des Vice-Présidents donc c’est difficile aujourd’hui de le dire, mais c’est un choix du peuple américain.
La primaire de la droite et du centre reste donc bien un enjeu majeur et déterminant quant à la situation politique du pays qui aujourd’hui est traversé par des troubles et des interrogations dans tous les domaines, y compris à l’échelle internationale.