MUSIQUE. Sourire charmeur, look décontracté, Jakub Józef Orliński casse les codes de la musique classique. Fini le stéréotype d’un monde austère et rigide, le jeune contreténor polonais de 28 ans apporte de la fraîcheur à la musique baroque en affirmant sa deuxième passion : le breakdance. Après un passage remarqué sur France Musique en juillet 2017, la carrière du chanteur s’est emballée au point d’enchaîner les tournées partout dans le monde. WorldZine est revenu sur ce parcours haut en couleur avec le principal intéressé.
WorldZine : Vous êtes contreténor, c’est-à-dire que votre voix d’homme peut aller très haut dans les aigus. Tout le monde peut chanter si haut ?
Jakub Józef Orliński : C’est une technique de chant, en utilisant le falsetto, qui permet en principe à tout homme de chanter comme contre-ténor. Mais chacun a son propre type de voix : vous avez votre ton, votre couleur. Vous avez juste besoin de pratiquer et de travailler pour développer l’agilité, le volume et la bonne technique pour utiliser votre voix d’une manière saine.
De plus en plus d’ensembles musicaux veulent populariser la musique baroque comme l’Arpeggiata… La musique baroque est-elle en train de revenir à la mode ?
Oui, je pense que le grand public est plus ouvert et prêt à explorer. Donc il réagit avec enthousiasme aux ensembles comme L’Arpeggiata, Il Pomo d’Oro, The English Concert, Le Concert d’Astrée, l’Ensemble Artaserse et beaucoup d’autres. Tous ces orchestres, avec leurs chefs et chanteurs, apportent quelque chose de frais et de très beau.
C’est pourquoi j’ai l’impression qu’il y a une sorte de retour de la musique baroque. Il y a beaucoup de représentations de très haut niveau et les gens veulent vraiment en entendre de plus en plus. Non seulement des concerts ou des enregistrements de cette musique, mais aussi des productions d’opéra ou d’oratorio. Je suis très heureux de voir comment ce genre de musique va se développer.
Vous êtes breakdancer et chanteur d’opéra : deux passions très différentes mais compatibles ?
Je pense que j’emprunte beaucoup de choses à chacun de ces arts. Il m’a vraiment fallu des années pour comprendre comment je pouvais faire cela et en tirer profit. Par exemple, introduire au chant les capacités que j’ai développées avec le breakdance. Ça m’aide vraiment. J’ai compris comment mon corps fonctionne et comment en utiliser chaque partie, alors mon travail peut être beaucoup plus efficace.
Vous savez justement comment vous échauffer et comment préparer votre corps et votre voix pour une autre longue journée de chant. Je commence toujours par échauffer mon corps, puis ma voix. Parce que dès que mon corps se réveille, c’est tellement plus facile de réveiller et de réchauffer ma voix.
Aussi quand je danse, je cherche des sensations que j’éprouve lorsque je chante des phrases dans des morceaux de musique particuliers. Cela peut sembler étrange, mais chacun doit trouver quelque chose qui fonctionne pour soi-même. Dans mon cas, ça fonctionne très bien, alors je le fais.
Y a-t-il un moment précis où cette combinaison était exceptionnelle ?
Le breakdance et, en général, les différents types de danses de rue sont très populaires dans les productions d’opéra. J’ai fait pas mal de productions où j’ai dû utiliser mes compétences et montrer quelques mouvements.
Je sais qu’il y a eu une grande production de Hansel & Gretel à l’Opéra de Zurich où ils ont utilisé des danseurs de hip-hop et des breakdancers. C’est vraiment fantastique de voir quelque chose comme ça quand c’est bien mis en scène. Ça apporte un nouveau public et donne aussi quelque chose de frais, alors j’aime cette combinaison tant qu’elle est bien justifiée. Ça doit être quelque chose de cohérent, et pas seulement pour faire le beau en public.
La musique classique est souvent décrite comme un genre pour personnes âgées. Arrivez-vous à attirer un public jeune dans vos concerts ?
Grâce à la nouvelle génération de metteurs en scène, de chefs d’orchestre et de chanteurs, il y a aussi une nouvelle génération de public. Les jeunes chanteurs utilisent des outils comme les réseaux sociaux pour promouvoir la musique classique. J’utilise par exemple Instagram et grâce au contenu que j’y poste, j’ai pas mal de gens qui suivent mes aventures musicales.
Je suis super content parce que je peux vraiment voir sur mes concerts beaucoup de jeunes et beaucoup de nouveaux venus, ce qui est extrêmement satisfaisant. Cela signifie que le travail que je fais pour promouvoir la musique classique porte ses fruits et que ce que je fais touche un nouveau public qui trouve intéressant d’aller voir un concert ou d’écouter de la musique classique sur Spotify, Apple Music ou Deezer.
Votre dernier album Anima Sacra est un vrai succès, quels sont vos prochains projets ?
Je suis très heureux que mon premier album solo Anima Sacra ait si bien marché. Je ne pourrais rien imaginer de mieux. J’ai beaucoup de projets, beaucoup d’idées pour l’avenir, mais pour l’instant je suis concentré sur une nouvelle version.
J’ai déjà enregistré mon deuxième album solo, il sort le 8 novembre. Le titre de l’album est Facce d’amore et vous pouvez trouver toutes les informations sur ce projet à venir sur mon site web, mon Instagram ou le site de Warner Classics & Erato. Je suis vraiment excité à l’idée de cette sortie parce qu’avec elle, il y a d’autres nouvelles choses qui sortent.