TÉLÉCOMS. Depuis le moratoire adopté en octobre 2020 par le conseil municipal de Lille, Martine Aubry n’en démord pas. Le réseau mobile 5G ne s’allumera pas avant la publication en avril-mai du rapport de l’Anses sur la dangerosité supposée des ondes.
Ondes néfastes, impact environnemental ou contrôle par des nanoparticules dans les vaccins… La 5G se sera frottée à toutes les polémiques en 2020. Bouygues, Free, Orange et SFR ont lancé leurs offres commerciales en décembre dernier dans une ambiance cacophonique. Le blocage de certaines villes troublant le jeu.
« Nous avons voté au conseil municipal de Lille ce soir un moratoire », déclarait gravement la maire de la capitale des Flandres sur Twitter le 10 octobre. Tantôt séduite par le nouveau réseau, tantôt sceptique, Martine Aubry joue le principe de précaution. En cause : la crainte d’une dangerosité des ondes émises par les antennes 5G et le souhait de répondre à un impératif de sobriété numérique.
Des interrogations sanitaires et écologiques
Si la ville de Paris a récemment conclu un accord avec les opérateurs, pas question de lever le moratoire sur la 5G à Lille sans l’avis de l’Anses. L’agence de la sécurité sanitaire devrait bientôt apporter des réponses, en particulier sur les ondes millimétriques. Cette fonctionnalité de la 5G promet, dans quelques années, des débits dignes de la fibre optique. Mais ces très hautes fréquences n’ont jamais été utilisées précédemment. « En 2020, quand on constate que le rapport ne sera pas remis alors que les enchères sont lancées, on se dit que ce n’est pas possible. On ne peut pas lancer une technologie qui inquiète », alerte Akim Oural, adjoint à la maire chargé du numérique.
Qu’est-ce que c’est le progrès ? Sans doute il a un socle technologique, mais il doit toujours être en écho aux défis de la société, ils sont environnementaux, sociaux et économiques. On ne superpose pas des technologies juste pour dire que ça va plus vite.
Akim Oural
Certaines fréquences utilisées pour la 5G en France sont déjà bien connues, similaires pour partie à celles de la 4G. Mais les opérateurs ne semblent pas inquiets non plus sur les ondes millimétriques (à partir de 26GHz). « Nous sommes confiants sur le rapport de l’Anses, des études ont déjà été menées partout dans le monde », assure Gautier Bezeau, attaché de presse chez Orange. La haute fréquence de ces ondes, de courte portée, demandera la pose d’un nombre plus important d’antennes, d’où les interrogations sanitaires et écologiques.
Des mairies sans pouvoir
Si les villes récalcitrantes à la cinquième génération de réseau mobile bloquent sa mise en service, elles ne disposent pas légalement de ce pouvoir. Depuis décembre dernier, les quatre opérateurs ont accepté de ne pas agir en force pour apaiser le débat houleux sur la 5G. Le responsable d’Orange avertit : « l’État nous donne l’autorisation d’émettre sur tout le territoire, mais on a tout intérêt à travailler en bonne intelligence avec les collectivités, ce sont des partenaires sur d’autres sujets comme la fibre. »
Les villes n’ont qu’un avis consultatif sur l’intégration paysagère. Il faut qu’on soit décideurs en partenariat avec l’État.
Akim Oural
Au-delà des enjeux politiques, le blocage des mairies appelle à réfléchir sur le lancement des futurs réseaux. « Aujourd’hui, on ne fait pas de modernisation sans emmener les citoyens derrière les technologies, ça doit être un avantage pour eux », précise le maire-adjoint de Martine Aubry. La question environnementale et des usages risque de faire débat pour le lancement de la génération supérieure. Car la 6G se profile déjà.